L’île Maurice est loin d’en avoir fini avec la marée noire qui s’est échappée du MV Wakashio. Le vraquier battant pavillon panaméen, et exploité par un armateur japonais, qui s’était échoué sur un récif au sud-est du pays le 25 juillet, a fini par s’ouvrir en deux, trois semaines plus tard, libérant quelques tonnes supplémentaires des 3 200 tonnes de fioul et 200 tonnes de diesel de sa coque. Jeudi 20 août, sa proue a commencé à être remorquée pour être coulée à quinze kilomètres au large par 3 000 mètres de fond, tandis que l’arrière restait fiché sur place.
Dès les premiers jours, les Mauriciens se sont mobilisés pour tenter de contenir le produit lourd et visqueux, l’empêcher de s’insinuer au pied des mangroves, de souiller les eaux cristallines des lagons et de la réserve naturelle de l’île aux Aigrettes, d’étouffer les coraux et engluer poissons, oiseaux, mammifères marins. Faute de matériels sophistiqués, ils se sont réunis par centaines pour confectionner d’immenses boudins en tissu remplis de paille de canne à sucre et de bouteilles en plastique pour améliorer la flottaison. Et certains se sont… coupés les cheveux. Pas en signe de désespoir, mais pour absorber avec leur toison les fuites d’hydrocarbures qui noircissent la surface de l’océan Indien.
Propriétés adsorbantes
Ils ne sont pas les seuls à miser sur ce matériau insolite. De toute la France, mais aussi d’Allemagne, de Belgique, du Luxembourg, de Suisse, du Portugal, des cheveux coupés sont arrivés pour nourrir la collecte organisée par Capillum. Cette jeune société de Clermont-Ferrand (Puy-de-Dôme) répondait ainsi elle-même à un appel à la solidarité lancé depuis l’île Maurice par une adhérente de l’association Project Rescue Ocean.
« Nous en avons reçu… des tonnes. Certains se sont rasé la tête », annoncent en chœur James Taylor et Clément Badellou, soit l’équipe au complet de la start-up clermontoise qu’ils ont fondée il y a un an. Tous deux n’en reviennent pas de l’engouement suscité par leur initiative et sont bien en peine d’évaluer les volumes collectés. Les cheveux continuent d’affluer en métropole dans les dix-sept entrepôts de la société Urby, avec qui Capillum a noué un partenariat. Des toiletteurs proposent aussi des poils d’animaux. Par précaution sanitaire, ces toisons ne sont pas acceptées. Il est prévu de stocker les sacs pleins de cheveux humains au moins 24 heures pour être certains qu’ils ne portent aucune de trace de coronavirus.
« Les cheveux font mieux qu’absorber, ce sont des adsorbants oléophiles et hydrophobes qui retiennent les hydrocarbures entre leurs écailles, expose James Taylor. Ils sont ultra-efficaces et peuvent retenir jusqu’à huit fois leur poids. En théorie, on pourrait même les essorer après les avoir utilisés et récupérer ainsi les huiles et les hydrocarbures. »
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August 23, 2020 at 08:45PM
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Les cheveux, une arme efficace pour lutter contre les marées noires ? - Le Monde
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